vendredi 7 avril 2023

Art Nouveau: gaffe à une «amende»!

 


Conquérir la suppression d’un mot dans la tarification sur un site internet d’un organisateur culturel peut paraître un détail.
Mais ce mot peut symboliser en six lettres les excès d’une industrialisation à outrance de cette matière dite « à supplément d’âme »: dans le cas présent, un festival de visites d’immeubles Art Nouveaux à Bruxelles.

De quoi s’agit-il concrètement?
Ainsi par un seul mot, une association subsidiée s’arroge depuis plusieurs années déjà le droit de pouvoir donner «une amende», de déterminer unilatéralement le montant de celle-ci et de la facturer à certains de ses usagers, sans autre forme de procès, uniquement selon le libellé de son règlement imposé unilatéralement à son si cher public.
En toute impunité depuis plusieurs années? Dans l’indifférence des pouvoirs publics, de divers confrères de la profession culturelle, de quelques médias censés investiguer, et, hélas, de nous-même. Ne soyons pas manichéen. Heureusement qu’il y a des exceptions et c’est un artiste (dont nous prenons nous-même la décision de le protéger par la préservation de son anonymat afin d’éviter d’éventuelles sarcasmes, voire représailles) qui a tuyauté «La Ligue des Usagers Culturels» (L.U.C.), ce qui a permis à celle-ci de réagir.

Avant son évolution suite à notre plainte, voici le texte de la tarification que la « Ligue des Usagers Culturels » a contesté. Le trait rouge relève de notre initiative, bien sûr.


L’organisateur a répondu dès le lendemain de l’envoi d’une plainte par la L.U.C. et a immédiatement supprimé le mot et la phrase litigieuse qui l’incluait. Excellente et prompte initiative. Mais, si on lit attentivement sa réponse, on n’y trouve aucune excuse, aucune prise de responsabilité et l’aveu implicite d’un amateurisme navrant dans la façon dont était rédigé ce qui se présente au public comme une règle à observer.

En plus, la dernière phrase de son message est un bijou. Il indique que l’asbl n’a « jamais appliqué ce principe ». Quel bel argument! Cela n’enlève rien au fait que le texte a été écrit.
Cela permettrait-il d’imaginer que pareille phrase ne serait publiée pour faire peur? Est-ce le rôle d’un règlement? Ceci nous fait penser à cette autre phrase également illégale par son manque de nuance que d’autres organisateurs culturels osent écrire peut-être avec une intention analogue: « Nous ne remboursons pas et n’échangeons pas ce ticket ».

Voici cette ultime phrase reproduite telle qu’elle nous est parvenue : «Étant donné que nous n'avons jamais appliqué ce principe et que de consulter un avocat spécialisé serait onéreux, nous allons simplement retirer ce terme du site».

Il nous semble que les mécènes, les sponsors et surtout les autorités publiques qui accordent des subsides devraient être beaucoup plus attentifs au libellé des tarifications, et aussi au contenu des règlements à destination du public imposés par les opérateurs qu’ils aident.

Tout ceci n’entame pas la qualité de ces visites guidées «Art Nouveau», ni les efforts du personnel et des bénévoles qui mitonnent cette passionnante activité.
Le blog a publié le présent article après la fin du festival 2023 afin de respecter son déroulement.  

Remercions l’organisateur d’Explore Brussels d’avoir effectué les évolutions de texte dans toutes les langues dans lesquelles cette tarification est affichée sur son site.

Voici notre plainte et la réponse de la direction du Festival Banad.  

La plainte de la L.U.C.

Voici le texte de la plainte adressée le 15 mars 2023 par la L.U.C. à la direction du Festival Banad.

Monsieur, Madame, je me permets de déposer plainte auprès de votre organisation.

Un opérateur culturel peut-il légalement facturer ce qu’il appelle lui-même une « amende » à un client/usager?

Dans le monde culturel de haut vol et subsidié, on est censé connaître le sens des mots et éviter la surenchère verbale, non?

Le Festival BANAD qui se déroule actuellement, et jusqu’au 26 mars 2023, le revendique sur son site internet, ce terme amende.

Cette activité est réalisée avec le partenariat de plusieurs organismes officiels et/ culturels, le plus souvent de grande qualité, ce qui pose encore plus question!

Même donc le plus honorable de notre culture accepte pareille dérégulation…

Il s’agit de l’ARAU, de Pro Vélo, d’Arkadia et de Bruxelles Bavard.

Voici le texte qui pose question: «Réduction de 50% sur le tarif plein pour les étudiants de moins de 26 ans, les étudiants de la VUB et de l'ULB, les détenteurs de la carte Culture ULB, les personnes à mobilité réduite et les demandeurs d’emplois.
Nous avons développé une politique de tarifs réduits afin de rendre les visites d'intérieurs accessibles au plus grand nombre. Si vous réservez au tarif réduit, vous devrez être en mesure de prouver que vous y avez droit. Si vous avez réservé au tarif réduit alors que vous n'y avez pas droit, Explore.Brussels vous facturera la différence ainsi qu’une amende de 50% du montant total de votre commande».

Il faudrait avoir un avis d’un ou de plusieurs avocats sur l’utilisation de ce terme!

L’amende est, de façon globale, une sanction pécuniaire édictée par la loi en matières civile, fiscale, douanière ou pénale, consistant en une somme d'argent payable à l’État. Historiquement, il existait aussi une sanction pécuniaire à caractère disciplinaire infligée par un employeur à son salarié. Elle fut, le siècle dernier, d’abord partiellement prohibée, puis interdite.

Une activité culturelle est-elle un policier, un tribunal… ou le Conseil supérieur de l’audiovisuel (qui, lui, peut infliger des amendes, mais selon un règlement extrêmement strict décidé par le pouvoir politique)?

Mon avis personnel? Je suis pour la légalité, donc je soutiens le fait que le public n’utilise pas un avantage auquel il n’a pas droit. Mais de là à ce qu’un organisateur culturel déclare infliger une amende…

Que l’organisateur demande donc au moment de l’achat ou au contrôle à l’entrée de l’activité elle-même la preuve du droit à une réduction, c’est ce qui se passe habituellement.

Lorsqu’il s’agit d’une activité où le nombre de participants possible est restreint et que c’est complet, il est logique que la solution soit, au constat à l’entrée de l’activité, pour des achats fait sur la toile, l’obligation de payer le complément manquant. Mais ce n’est pas une amende!

L’étape suivante serait le casier judiciaire? De qui se moque-t-on? Du public, tant chéri dans les mots et les intentions affirmées, mais constatez ce type d’outrance dans la pratique quotidienne.

Dans l’attente de vos lire, je vous prie de croire en l’expression de mes sentiments distingués.

La réponse de Explore Brussels


Le 16 mars 2023, Julien Staszewski, Directeur de l’asbl «Explore Brussels» répond (sur le papier à lettre, est également mentionné après la signature : ARAU - Arkadia - Bruxelles Bavard - Pro Velo).

Cher Monsieur, merci pour votre retour et lecture attentive de notre site internet.

Vous avez tout à fait bien saisi la logique de l'idée: l'intention est d'éviter que le public utilise un avantage auquel il n'a pas droit.

Je suis désolé si le terme «amende» vous choque / ne vous semble pas légal. Nous ne l'avons en effet pas fait vérifié par un avocat spécialisé à l'époque où nous avons inscrit cette phrase (lors de la 1ère édition du BANAD de mémoire).

Etant donné que nous n'avons jamais appliqué ce principe et que de consulter un avocat spécialisé serait onéreux, nous alons simplement retirer ce terme du site: : https://www.banad.brussels/fr/infos-pratiques/tarifs

Bien à vous.

 


lundi 3 avril 2023

Liège ressuscite nos 15 droits culturels du public

Mars 2023 : à Liège, le Musée de la Boverie vient d’afficher à la caisse, dans son hall d’entrée, la nouvelle affiche « Engagements » qui détaille les 15 droits des usagers culturels.
Ainsi, il applique le point 1 du Code que doivent également appliquer plus de 30.000 diffuseurs subsidiés par la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Tous ceux-ci (du centre culturel au festival d’été, en passant par les bibliothèques, les musées, les salles de spectacles, etc.) respectent-ils de façon analogue cette obligation d’affichage qui nous permet de découvrir nos droits de public?

 Le mois de mars 2023 aura été capital pour les usagers culturels en Belgique francophone.

Depuis dix-sept ans, quinze droits pour ceux-ci existent. Ils ont été précisés, le 3 février 2006. Ce jour-là, le « Code de respect des usagers culturels » était adopté par le gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Ce qui veut dire que, depuis, plus de 3.000 diffuseurs culturels subsidiés par la Fédération Wallonie-Bruxelles sont obligés d’appliquer chacun des quinze points de ce Code: bibliothèques, salles de spectacles, maisons de la culture, théâtres, cinémas, festivals d’été, concerts, etc.

Étiez-vous au courant?
Un petit exemple concret parmi d’autres: le droit N°7 indique que l’organisateur doit proposer spontanément aux usagers le meilleur tarif qui leur est applicable. Ceci peut paraître normal à beaucoup. Sans doute pas à tout le monde. Et ici, à la différence par rapport à d’autres pays ou régions, c’est que ce n’est pas simplement une possibilité mais bien une obligation.

L’information de l’usager culturel

Le premier point du Code indique notamment que chaque diffuseur doit « afficher le Code en évidence, à l’entrée et à la sortie de tous les lieux où il accueille les usagers ».
C’est un point capital car ce n’est que si on connait ses droits qu’on est attentif à ce qu’ils soient appliqués, et que ces droits vont alors vivre et se développer.
Or, le public culturel, quasi dans le monde entier, n’est pas habitué à avoir des droits…
Il a surtout des devoirs à respecter, et les règlements à destination du public en fourmillent. Voici un de ces règlements particulièrement épicé : https://fine-arts-museum.be/fr/votre-visite/planifier-sa-visite/reglement-du-visiteur

Il est donc original et fort novateur de mettre en place ainsi des « droits » des usagers culturels.
Ceux qui ont préparé ledit Code (des représentants des usagers et des créateurs, des associations de consommateurs, des membres de la Direction Générale de la Culture) furent donc particulièrement attentifs à ce que le public découvre le contenu détaillé de ses droits.

Et pourquoi l’affiche doit-elle se trouver si précisément « à l’entrée ET à la sortie »?
À l’entrée pour que l’usager découvre ses droits dès son arrivée à l’activité, ce qui lui permettra d’être attentif à ce qu’ils soient respectés durant celle-ci.
Et à la sortie, pour le public qui aurait eu affaire à une difficulté. Alors, celui-ci sera bien content de relire les démarches à entreprendre pour la résoudre.

En 2006, le Ministère de la Culture a distribué auprès des diffuseurs des lots d’affiches en couleurs et de grand format (60 x 80 cm).

Le point 1 du Code ajoutait que cette affiche devait aussi être présentée sur les site internet de ces milliers de diffuseurs.

Voici cette affiche de 2006 :
https://www.culture.be/index.php?eID=tx_nawsecuredl&u=0&g=0&hash=098da72b12d4c32661de7b1a43adf980e223e601&file=fileadmin/sites/culture/upload/culture_super_editor/culture_editor/documents/Documents_utiles/Droits_des_usagers_et_publics_de_la_Culture/code_usagers.pdf

Guy Duplat écrit de façon quasi prémonitoire dans «La Libre» du 20 janvier 2007: «On sait que ce Code veut mieux protéger les droits des usagers. Alors, tout est-il parfait dans les meilleurs des mondes, ou est-ce un manque d’information des usagers qui ne connaissent pas leurs droits? Ne faut-il pas mieux afficher le Code des usagers à l’entrée des lieux?».

Donc ce journaliste bien connu et respecté par la profession laisse entendre dès 2007 que l’affichage à l’entrée et à la sortie des lieux commence à laisser à désirer.

Durant les seize années qui ont suivi la création de ce Code aucune nouvelle affiche n’a été conçue, imprimée et diffusée par la Direction Générale de la Culture.
Aucune autre promotion n’a été faite. Par exemple, personne n’a célébré les dix ans de son existence pour en faire un bilan et construire son avenir, comme cela se pratique pour nombre de nouvelles pratiques sociales ou culturelles.

Enfin, durant tant d’années, aucune évolution n’a été apportée aux quinze points du Code. Et pourtant il existe bien au moins une recherche fort instructive menée par Roland de Bodt.
Pendant près de quatre ans, celui-ci a développé une recherche et en a publié les résultats dans trois numéros de la revue «Repères»: les numéros 8, 9 et 10, publiés en version papier, de l’automne 2018 à l’été 2019, et téléchargeables gratuitement en version numérique : https://opc.cfwb.be/index.php?id=4036 ).
En expert de l’Observatoire des Politiques Culturelles, il y a cherché le bien fondé des 15 points du Code des Usagers culturels et a émis des propositions d’évolution. Dans son inventaire final, il en détaille 54 («Repère» N°10, pages 30 à 29).
C’est un travail préparatoire titanesque pour nous tous. À part un débat qui s’est déroulé à la «Bibliothèque 27 septembre» en sa présence, jusqu’à présent pas grand monde ne s’est emparé de cette somme d’informations et de réflexions.

Il a fallu trois livraisons de «Repères», en 2018 et 2019, pour développer 54 réflexions à propos des 15 points du Code. Quand serviront-elles enfin de base à un travail sur l’évolution et le développement des droits des usagers culturels?

Roland de Bodt, l’auteur de la recherche «Liberté culturelles & droits des usages».

Le Code continue

En 2022, après une longue enquête, la Ligue des Usagers Culturels (L.U.C.) a pu prouver à la Ministre de la Culture Bénédicte Linard qu’une toute petite minorité des diffuseurs et d’usagers connaissaient encore le contenu de ce Code.

S’en est suivi une rencontre (sans la L.U.C.) entre le cabinet de celle-ci, le Médiateur de Wallonie et de la Fédération Wallonie-Bruxelles et la Direction générale de la Culture.
Le cabinet de la Ministre a alors confirmé par écrit à la L.U.C., en juillet 2022, que le Code devait poursuivre sa route: «Ce texte, affiché dans de nombreux lieux culturels, donne un source de légitimité aux personnes lésées d’interpeller les organisateurs responsables, afin de régler d’éventuels problèmes. (…) Toucher plus et mieux les populations, les publics, dans leurs diversités et leurs éloignements est la priorité qui mobilise l’AGC, priorité validée par le Gouvernement».

La phrase du regretté Henry Ingberg garde donc ainsi toute son actualité. Celui-ci, lorsqu’il dirigeait notre ministère la culture, donna son feu vert à cette orientation inédite «usagers culturels» et présida à la naissance du Code. La voici : «Le rapport à l’usager est un véritable enjeu. Jusqu’à présent l’autorité publique n’a pas pris en compte cette problématique de manière systématique et organisée. Il y a distorsion par rapport à une amplification des pratiques des loisirs par la collectivité».

Mais concrètement, quels types de plaintes sont traitées?
Selon quelques recherches parcellaires menées par la L.U.C., il apparait que nombre de celles-ci concernent le point 2 du Code qui n’est, en fait, qu’une application à la culture de notre législation économique: avant achat, le vendeur est tenu d'expliquer clairement à l’acheteur ce à quoi il s’oblige et «tout pacte obscur ou ambigu s'interprète contre le vendeur».

À ce sujet, voici quatre exemples précis qui ont permis d’améliorer l’information des usagers culturels.

1: Plusieurs plaintes ont été adressées, avec effets constructifs, à des musées qui pratiquent la gratuité «pour tous» du premier dimanche du mois. Cet avantage mensuel «pour tous» n’apparaissait pas dans leur tarification. Or, le public doit être au courant de celle-ci pour avoir le choix entre venir un jour payant ou un jour gratuit.

2: Les réductions pour les seniors sont passées progressivement d’un âge unique (les plus de 60 ans) à, soit au maintien à 60 ans, soit 65 ans, ou même 67 ans.
Il convient donc de préciser désormais l’âge choisi par l’organisateur dans les tarifications. Ce n’était pas le cas ni dans un cinéma, ni dans un musée.
Des plaintes sur ce point ont permis à ces deux lieux de mieux détailler leurs tarifications. Plus d’info : http://la-luc.blogspot.com/search/label/Plaza%20Cinema

3: Une plainte a été adressée à un théâtre qui proposait une pièce où des comédiens fument sur scène.
Qu’indique la législation belge? Il est interdit de fumer dans les lieux couverts. Cela devrait donc être, en terme de santé publique, aussi le cas des salles de spectacles mais une dérogation a été donnée par le Ministère des affaires économiques au niveau fédéral afin que des comédiens puissent pratiquer cet acte sur scène, mais à condition que le public en soit informé.
Un théâtre pris en défaut a tenu compte de la plainte qui lui a été adressée et s’est empressé d’indiquer sur son site, quelques jours avant l’événement : «Nous vous signalons que les interprètes fument sur scène pendant la représentation».

Suite à une plainte, en 2021, le Théâtre de Namur a fait évoluer son site en y ajoutant la phrase mise en exergue au bas de la présente illustration.

4: Dans tel lieu culturel, il est permis de photographier. Pourtant, au dos du ticket et sur le comptoir à l’accueil, il est indiqué le contraire. Sur le site internet, c’est le silence.
L’acteur culturel a été interpellé et a répondu par ces mots qu’il allait tenir compte de ladite plainte: «C’est aussi grâce aux retours visiteur comme le vôtre que nous pouvons nous améliorer». Voici les détails du déroulement de cette plainte : http://la-luc.blogspot.com/2022/10/y-photos-ou-y-pas-au-bam.html

Bien sûr, les autres points du Code suscitent d’autres réactions. Il a donc permis, même en étant bien peu médiatisé, de résoudre déjà une série de problèmes mais il ne faut pas s’arrêter là. La L.U.C. (qui est une asbl régie par le bénévolat et agissant sans subside, ni sponsor, ni publicité) demande que les exemples les plus significatifs de plaintes, abouties ou non, soient médiatisés régulièrement par le ministère tant auprès des organisateurs, des créateurs et du personnel politique que du public, via une newsletter ou avec l’aide des médias, afin que le «mieux vivre ensemble» culturel profite de ces enseignements et puisse plus facilement se généraliser, s’intensifier.

Ce Code n’est pas du pipeau car les acteurs culturels qui ne le respecteraient pas peuvent encourir diverses sanctions: «S’ils n’en respectent pas les principes, les acteurs culturels reconnus et/ou subventionnés par la Fédération Wallonie-Bruxelles qui s’engagent à respecter le présent Code pourront être sanctionnés par la Fédération Wallonie-Bruxelles (…) Les sanctions appliquées seront proportionnelles à la gravité et la récurrence des manquements aux engagements (exemples de sanction : suspension temporaire d’une partie de la subvention accordée, suspension temporaire de la totalité de la subvention accordée, diminution de la subvention accordée, résiliation de la convention ou du contrat programme). La Fédération Wallonie-Bruxelles ne sanctionnera les opérateurs culturels défaillants qu’après un avertissement et un rappel à l’ordre».

Les 15 points du Code intéressent le Fédéral

Les 15 points du Code de la Fédération Wallonie-Bruxelles sont en passe d’être repris ou adapté au niveau fédéral.
Dès leur mise sur orbite, déjà en 2007, ils ont marqué l’intérêt des Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique (MRBAB) qui rassemblent le Musée d’Art Ancien, le Musée Fin de Siècle, le Musée d’Art Moderne (fermé «provisoirement» depuis le 1er février 2011), le Musée Magritte, le Musée Meunier et le Musée Wiertz, comme l’indique la lettre que nous publions ici en photo.


D’autre part, dès sa nomination, en tant que Secrétaire d’État chargé notamment de la Politique Scientifique (dont les Musées fédéraux: en plus des MRBAB, ce sont le Musée des Sciences Naturelles, le Musée d’Art et Histoire, le Musée des Instruments de Musique, l’Africa Museum), Thomas Dermine a indiqué à plusieurs reprises par écrit à la L.U.C. sa volonté d’adapter les 15 engagements du Code des usagers culturels aux institutions qui le concerne: http://la-luc.blogspot.com/2020/11/le-secretaire-detat-des-musees-nous.html

Ceci prend un certain temps car il fallut d’abord restructurer BELSPO: https://www.belspo.be
Lorsque cette étape fut franchie, Arnaud Vajda, son nouveau Président du Comité de Direction, a accordé un long entretien à la L.U.C., le 6 février 2023, au cours duquel il a notamment confirmé son intention de concrétiser cette adaptation des 15 points du Code des usagers Culturels.

Le Secrétaire d’État Thomas Dermine souhaite adapter aux musées fédéraux les 15 points du Code de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Comment remédiatiser le Code?

À la mi-décembre 2022, La Direction générale de la Culture a envoyé une instruction aux plus de trois mille diffuseurs qui rappelle qu’ils doivent observer le Code.

Une nouvelle présentation de celui-ci est alors proposée.
Si les 15 points du Code demeurent, le reste du texte a évolué et une nouvelle adresse est indiquée pour le dépôt des plaintes des usagers. Il faut donc oublier l’affiche de 2006 et impérativement utiliser cette nouvelle présentation.

Voici cette nouvelle présentation : https://www.culture.be/index.php?eID=tx_nawsecuredl&u=0&g=0&hash=585202c32356d68ca00c6a9dc87a53e7df3a5974&file=fileadmin/sites/culture/upload/culture_super_editor/culture_editor/documents/Documents_utiles/Droits_des_usagers_et_publics_de_la_Culture/202211-A3-codeusagers-web.pdf

La bonne volonté du ministère est un fait. Dès que cette nouvelle présentation fut opérationnelle à la mi-décembre 2022 sur le site www.culture.be, la L.U.C. fit plusieurs propositions d’évolution et trois d’entre-elles furent acceptées et mises en place, début mars 2023.

Il serait utile d’ajouter sur cette affiche un QR Code.

Cet e-mail de Direction générale de la Culture omet pourtant d’indiquer aux diffuseurs si elle se charge elle-même d’imprimer et de leur envoyer ces grandes affiches comme elle le fit en 2006. Ce silence cache en fait son souhait de ne plus assumer elle-même cette tâche. Les plus grands diffuseurs peuvent probablement assez facilement imprimer eux-mêmes les grands formats en quelques exemplaires (par exemple en 60 x 80 cm comme ce fut le cas pour la première et seule affiche créée depuis 2006). Mais c’est sans doute bien plus compliqué pour les diffuseurs de plus petite taille. Est-ce à eux qu’il revient d’organiser et de financer la matérialisation de cette obligation alors qu’ils ont dû affronter les effets économiques de la pandémie, de la guerre en Ukraine, des évolutions énergétiques et de l’actuelle inflation des prix?

La L.U.C. pense que la Direction générale de la Culture, en fonction de ses objectifs affichés, devrait continuer à coordonner le travail de médiatisation du Code sur le long terme, d’autant plus qu’elle avait trouvé normal et possible de le faire en 2006.
Il lui semble souhaitable qu’une nouvelle affiche voit le jour non pas seize ans après l’impression de la précédente, mais que, par exemple, elle soit renouvelée tous les deux ans pour tout simplement tirer les leçons de ce passé qui a failli passer au bleu ces 15 droits.
Et si elle s’y refuse, elle devrait au moins l’exprimer clairement aux diffuseurs.

Il faut, bien sûr, que les nouvelles affiches n’aient pas la dimension d’un timbre poste. Il convient de respecter l’esprit qui sous-tend la rédaction du Code. Elles doivent inciter le public à prendre le temps de lire le texte dense qui définit chacun des 15 points.

Le président de « La Ligue des Usagers Culturels » présente l’un des derniers exemplaires de l’affiche de 2006 qui détaille les 15 points du Code ainsi qu’un «mode d’emploi» pour déposer plainte.Celle-ci doit être rapatriée dans ses archives. En effet, il ne faut plus jamais l’exposer car l’adresse pour déposer plainte a entretemps changé. Mais alors ainsi pourquoi la montrer? Pour rappeler sa taille (60 x 80 cm) … afin que des petites sœurs qui vont naître en 2023 soient aussi grandes ! Il faut que les usagers puissent bien lire sans loupe le texte qu’elle est chargée de médiatiser.

 
À Liège, La Boverie a affiché le Code des usagers culturels aussi à la sortie de son institution. Afin que le public, au terme de sa visite, sache où et comment déposer éventuellement plainte.  
C’est le directeur des musées de la ville de Liège, Pierre Paquet, qui a fait parvenir à la L.U.C. cette photo, la suivante ainsi que la première publiée dans cet article. Qu’il en soit remercié.

La ville de Liège commence à agir

La résolution récente en mars 2023 de la plainte adressée par la L.U.C. à un musée de la ville de Liège démontre l’utilité de ce Code. Ici, il s’agissait d’en respecter le point 2.
Voici les échanges de courriels avec la direction du Musée de La Boverie qui ont mené à une solution utile pour bon nombre de visiteurs : http://la-luc.blogspot.com/2023/03/la-boverie-doit-repondre-aux-plaintes.html

Lorsque Pierre Paquet, Directeur des Musées de la ville de Liège, a annoncé cette évolution à la L.U.C., la L.U.C. lui a fait parvenir la lettre suivante :

« Je vous remercie pour votre réaction. Elle vous honore. Nous venons de publier sur notre blog un article détaillé sur cette plainte et son aboutissement. Bien entendu, je vous invite à le diffuser sur vos réseaux.
http://la-luc.blogspot.com/2023/03/la-boverie-doit-repondre-aux-plaintes.html
Vous avez bien compris que le Musée de La Boverie n’est qu’un musée parmi d’autres qui sont sous l’autorité de la ville de Liège.
Pourriez-vous nous indiquer à quelle date ils auront tous mis en place complètement la concrétisation des points 1, 6, 13 et 14 du Code ?
À retrouver ici : https://www.culture.be/index.php?eID=tx_nawsecuredl&u=0&g=0&hash=585202c32356d68ca00c6a9dc87a53e7df3a5974&file=fileadmin/sites/culture/upload/culture_super_editor/culture_editor/documents/Documents_utiles/Droits_des_usagers_et_publics_de_la_Culture/202211-A3-codeusagers-web.pdf
Liège serait ainsi sans doute la première ville wallonne à respecter dans ses multiples institutions (il y a aussi les bibliothèques, les salles de spectacle, les cinémas, les centres culturels, etc.) les droits des visiteurs, via ce Code des usagers.
Et pourquoi ne fêteriez-vous pas avec nous pareil événement?  Si vous cherchez des idées pour ceci, on peut en parler! Au plaisir de vous voir réagir».

Ensuite, Pierre Paquet, Directeur des Musées de la ville de Liège, lui répond le 20 mars 2023 en ces termes:

«Vous trouverez ci-joint les vues sur les affichages du Code au Musée de La Boverie.
Nous poursuivons la mise en place pour nos autres sites, en fonction du planning général de travail des collaborateurs, et nous ne manquerons pas de vous tenir informé lorsque ce sera le cas. Des exemplaires de ce code seront également mis à disposition des usagers qui le souhaitent sur nos différents sites. Bien à vous».

Deux « bravos » pour cette plainte au Musée de La Boverie

Remarquons d’abord qu’enfin une institutions culturelle remédiatise la toute nouvelle affiche du Code, et ce, avec ses moyens propres (puisque le Ministère de la Culture n’a pas imprimé lui-même celle-ci jusqu’à présent).

Et d’autre part, il faut constater que le tout nouveau processus pour déposer plainte a bien fonctionné. Ceci demande une explication.

Suite au constat en 2022 de l’état de quasi mort clinique du Code dénoncé par la L.U.C., le cabinet de la Ministre de la culture a organisé une réunion de travail avec le Ministère de la Culture et le Médiateur de Wallonie et de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Celle-ci a abouti au maintien des 15 points du Code pour le long terme, mais aussi à un évolution significative de la façon dont le Ministère de la culture traitera les nouvelles plaintes que lui feront parvenir les usagers.

Pour découvrir cette évolution: il suffit de comparer ce qui est mentionné dans la deuxième partie de l’affiche, après l’énoncé des 15 points.

 
Affiche de 2006:
https://www.culture.be/index.php?eID=tx_nawsecuredl&u=0&g=0&hash=098da72b12d4c32661de7b1a43adf980e223e601&file=fileadmin/sites/culture/upload/culture_super_editor/culture_editor/documents/Documents_utiles/Droits_des_usagers_et_publics_de_la_Culture/code_usagers.pdf

Affiche de décembre 2022:
https://www.culture.be/index.php?id=5235

Ce qui s’est passé au Musée de La Boverie montre que l’application de ce nouveau fonctionnement est un succès.

Le Code est un atout fondamental pour une amélioration de notre vie culturelle qui devra sans doute de plus en plus lutter non pas contre l’industrialisation de la culture, mais contre des excès de celle-ci, à un niveau régional, national et international.

Pour ne prendre que l’exemple de la musique, est-il normal qu’en quelques décennies, le démarrage de la prévente des tickets de spectacles se fasse de plus en plus tôt? En 1988: 6 à 9 mois pour les spectacles de Pierre Rapsat, de JJ Goldman ou de Michel Sardou. Actuellement: 18 à 21 mois pour ceux de Mylène Farmer ou de Stromae. Est-ce normal lorsque bien de ces activités sont très rapidement sold-out? Qu’en sera-t-il dans quelques années, si aucune régulation ne se met en place?
Ou que penser du développement actuel de la «tarification dynamique» au départ des États-Unis avec un Bruce Springsteen, par exemple?

N’oublions pas que ces évolutions rendent d’abord la culture de moins en moins accessible aux moins nantis d’entre-nous alors qu’elle est un bien essentiel pour tous.

Aussi ce Code en 15 points n’est bien sûr qu’un début. Il faudra le faire fructifier par d’autres mesures afin que le «supplément d’âme» de la culture ne soit jamais menacé mais s’amplifie.

Il est utile que le public lui-même soit attentif au respect de ses droits. Mais pour ce faire, il doit les connaître.

Beaucoup d’organisateurs culturels sont de très bonne volonté et prêts à respecter le mieux possible leurs usagers. À condition d’avoir connaissance notamment du contenu de chacun des points du Code.

Notre ministère de la culture doit donc, selon nous, veiller inlassablement, mois après mois, année après année, et avec imagination, au concret de cette mission d’information, et du public, et des médias, et des plus de trois milles diffuseurs culturels qu’il aide.