mercredi 16 décembre 2020

Un Code des usagers qui serait utile aussi aux institutions fédérales elles-même !



Le Palais des Beaux-Arts de Bruxelles (BOZAR) a heureusement réussi à mettre fin à la «pratique» suivante dommageable pour son public.
Si un Code fédéral des usagers culturels existait et avait consacré un de ses points à une leçon tirée de cette expérience, le nouveau musée de la KBR (Bibliothèque Royale) qui vient d’être inauguré durant le premier déconfinement 2020 aurait pu s’en inspirer.
Ainsi, pareil Code serait aussi utile aux organisateurs culturels fédéraux.


Frida Kahlo et El Greco


De quoi s’agit-il?
Pour son exposition «Frida Kahlo y su mundo» (du 16 janvier au 18 avril 2010), B0ZAR indique sur son site: «Accès à heure fixe. Réservations conseillées». Cet avis est répercuté par la presse écrite. Sur le site de l’organisateur, il est également mentionné que la réservation par téléphone est impossible.
Se procurer une place à l’avance via internet, c’est sans obstacle pour les visiteurs qui paient le prix plein (8,00 €) ou qui bénéficient des réductions les moins importantes (5,00 € pour les +60 ans ou les -26 ans).

Par contre, il est techniquement impossible de réserver sur le site pour les personnes qui ont droit aux réductions les plus fortes: les professeurs et les demandeurs d’emploi (3,00 €), ainsi que les «Article 27» (1,25 €).

Exemple d’un problème concret survenu suite à cette discrimination: le samedi 23 janvier 2010, trois visiteurs venus de Flandre purent visiter l’exposition car ils avaient payé 8 € avec réservation par internet. Mais ils étaient accompagnés par cinq professeurs qui ne pouvaient pas réserver de cette façon, à cause de leur forte réduction. Comme c’était sold out, ils n’ont pas pu entrer. À quoi donc cela sert-il d’accorder des réductions si les personnes à qui on juge socialement utile d’offrir pareil avantage sont contraintes de se déplacer une première fois à B0ZAR pour réserver, et une deuxième fois pour enfin visiter l’exposition?
Qu’est-ce qui empêche l’institution de vérifier, quelques instants avant leur visite, si les détenteurs des réductions à 3 € et 1,25 € ont bien droit à pareils avantages? C’est d’ailleurs bien prévu pour les +60 ans ou les -26 ans (réductions à 5,00 €) qui, eux, peuvent réserver via internet et seront invités à montrer leur carte d’identité lors de la réception de leur place.

À une plainte envoyée le 25 janvier 2010, suivie de son rappel le 3 février 2010, le directeur du lieu, Paul Dujardin, répond le 18 février 2010. Il ne prévoit pas d’élargir la possibilité de réserver par internet aux trois catégories d’usagers «exclus». Sa réponse se termine par ce qu’on peut considérer comme une promesse: «Nous nous attelons à trouver une solution pour toute personne qui nous informe d’une difficulté spécifique. C’est d’ailleurs, vous le savez, une volonté (de Bozar que) d’ouvrir nos activités à toutes les catégories de visiteurs et notre politique tarifaire s’inscrit dans cette perspective».
Aucun changement ne sera mis en place avant la fin de cette exposition. Elle n’est pas un cas isolé: le même processus discriminatoire de réservation via internet a été utilisé plus tard par BOZAR pour d’autres expositions comme celle consacrée à El Greco (du 4 février au 9 mai 2010).


La solution de BOZAR


En 2020, une solution a été trouvée. Le service de presse de BOZAR nous explique: les réservations en ligne pour les expositions sont obligatoires depuis la réouverture des expositions, le 19 mai 2020, en raison de la crise Covid (uniquement des ventes en ligne, pas d’argent liquide, nominativement en raison de la traçabilité et dans des créneaux horaires avec une limitation du nombre de personnes).
Pour pouvoir bénéficier de l’une des réductions, BOZAR demande aux visiteurs de fournir une attestation.Ils peuvent envoyer une copie de leur attestation par e-mail. Après, BOZAR contactera ces personnes pour le paiement du ticket. Il est proposé de faire la demande un jour avant la visite.


Si le Code avait tiré la leçon…


À moins d’un kilomètre de BOZAR, à la mi-septembre 2020, est inauguré le nouveau musée de la KBR (la Librairie des Ducs de Bourgogne) et certains visiteurs se retrouvent face au même problème que ceux vécus lors de l’exposition «Frida Kahlo y su mundo». 

En effet, l’institution inscrit dans sa tarification (alors qu’on réserve par tranche horaire, 50 visiteurs maximum par heure) «Les tickets gratuits sont seulement disponibles sur place». Conséquence: les moins de 18 ans, les chômeurs et les moins valides doivent venir sur place (puisque leur entrée est gratuite), et si c’est plein, tant pis pour eux.

Suite à une plainte de La Ligue des Usagers Culturels, une réponse sera donnée rapidement par Églantine Lebacq sur la page facebook «Bruxelles est en Bourgogne»: «Pour notre système de réservation des tickets gratuits en ligne, nous sommes bien conscients du problème actuel et nous mettons tout en œuvre pour y remédier au plus vite».

Quelques jours plus tard, le site KBR prévoira, pour le public qui a droit à l’entrée gratuite, la possibilité de réserver sa place via internet comme tous les autres visiteurs, avec cette remarque particulière qui est tout-à-fait normale: «(…) Les visiteurs bénéficiant de la gratuité doivent prouver qu’ils y ont droit. Après vérification, vous recevrez un ticket d’accès au musée».