jeudi 17 février 2022

Hôtel Solvay : Photos interdites

L’hôtel Solvay est considéré comme l’un des plus beaux immeubles érigés par l’architecte belge Art Nouveau, le baron Horta.

Il est situé au 224, avenue Louise à Bruxelles, à 50 mètres de l’étrange monument «Le Labyrinthe du Monde» de Jean-François Octave dédié à l’écrivaine Marguerite Yourcenar née le 8 juin 1903 dans l’immeuble qui s’élevait naguère juste sur le trottoir d’en face (là où s’ouvre désormais la galerie Bailli-Louise).

Cet hôtel est d’autant plus remarquable par le fait qu’il présente encore aujourd’hui dans un état de conservation exceptionnel ses meubles, peintures et multiples objets de décoration d’origine conçus ou commandés spécialement pour lui par le célèbre architecte.

Longtemps inaccessible au grand public, ce n’est que peu avant le début de la pandémie du Covid qu’il a rouvert ses portes plus régulièrement aux visites de 40 minutes destinées à ceux et celles qui ont la patience de réserver leur venue longtemps à l’avance.

Les responsables de ces visites sont attentifs à leur public. Par exemple, sur leur site, au moment où nous écrivons le présent article, ils indiquent à leurs futurs visiteurs, et ce avant qu’ils n’achètent leurs tickets, que : «Nous restaurons la façade Solvay. Vous réservez un billet à un moment où un échafaudage du chantier est placé pour refaire une beauté au bâtiment».

Une photo officielle de l’intérieur de l’Hôtel Solvay.


Néanmoins, nous leur avons adressé la triple plainte suivante, le 10 janvier 2022. Ils nous ont rapidement  répondu (dix-huit jours plus tard) et de façon circonstanciée.

Belle victoire de la L.U.C. au profit de tous les futurs visiteurs: le site de l’Hôtel Solvay préviendra désormais son public du fait qu’il ne pourra pas photographier au cours de sa visite.
Prévenu, et donc pas ou moins déçu sur place.

Voici donc nos échanges intégraux à propos des trois griefs que nous avons émis :


1 : Victoire ! Annoncer l’interdiction de photographier

- Questionnement de « La Ligue des Usagers Culturels » (L.U.C.):
« Dans le document électronique qui nous lie lors de l’achat de mon ticket manque un élément essentiel qui définit votre prestation économique, à savoir le fait qu’il est interdit de photographier (même sans flash) durant la visite.
Il ne s’agit pas ici de débattre du bien fondé (ou non) de cette interdiction mais uniquement de tenter de préserver le droit bien réel du public d’en être averti avant de se décider de participer à votre activité. En effet, notre Code civil indique clairement que le vendeur est tenu d'expliquer clairement ce à quoi il s’oblige et que tout pacte obscur ou ambigu s'interprète contre le vendeur ».

- Réponse du service billetterie de Visit.Brussels :
« Il est certain que ce point peut décevoir les visiteurs. Nous en avons avisé l’Hôtel Solvay qui, depuis peu, communique l’information sur son site: https://hotelsolvay.be/tickets/
Nous envisageons aussi de sonder nos partenaires culturels afin de connaître des interdictions/empêchements de la sorte et de pouvoir les communiquer sur nos tickets ».

- Commentaire de la L.U.C. :
« Merci pour cette réaction concrète positive qui montre votre écoute et marque une évolution concrète. L’interdiction est désormais parfaitement indiquée, au bon endroit (impossible pour le futur acheteur d’un ticket de passer à côté) et en orange, elle tranche sur le fond noir : https://hotelsolvay.be/tickets/
Il serait intéressant qu’un jour Visit.bruxelles s’implique dans l’organisation d’un débat public sur ce fait de pouvoir ou non photographier (sans flash) dans les lieux culturels à Bruxelles.
En France, une charte a été établie et est appliquée après de longues négociations entre les parties prenantes. C'est «Tous photographes!» : https://www.culture.gouv.fr/Espace-documentation/Documentation-administrative/Tous-photographes-%21-La-charte-des-bonnes-pratiques-dans-les-etablissements-patrimoniaux
À Bruxelles, on en est nulle part. Si on partait des travaux plutôt réussis de la France, et des premiers résultats concrets de son application?
Chez nos voisins, l'équivalent pour les musées de notre belge "Ligue des Usagers Culturels" se nomme «Louvre pour tous» (il ne dépend pas du musée du Louvre, c'est un groupe de citoyens très efficace). Il a participé activement à l'élaboration de cette charte, et voici son avis nuancé, et même assez critique :  http://www.louvrepourtous.fr/Charte-des-visiteurs-photographes,764.html..


 

2 : Être plus constructif à l’égard du public

- Questionnement de « La Ligue des Usagers Culturels » (L.U.C.):
« Je me permets, d’autre part, de vous signaler que le très long texte de vos conditions générales ne propose quasi que des éléments restrictifs et négatifs à l’égard de l’usager et quasi aucun élément constructif, un peu comme si le public ne disposait d’aucun droit.
Il me semble que pour valoriser votre image (notamment à un niveau international puisque l’aspect touristique de votre démarche est essentiel) vous pourriez réviser différents éléments de votre texte afin qu’il soit plus accueillant à l’égard de votre public ».

- Réponse du service billetterie de Visit.Brussels :
« Nos conditions générales ont été libellées par notre service juridique, ce qui restreint l’exercice à son caractère fondamentale. Pour ce point aussi, nous envisageons de suivre votre conseil ajoutant des éléments tels que « Vous êtes l’heureux détenteur d’un ticket qui vous donne droit à … » ».

- Commentaire de la L.U.C. :
« Quand il y a des interdictions, il y a souvent des raisons légitimes. Le public est reconnaissant lorsqu’on lui en explique le pourquoi, et sans lui mentir ou pratiquer la langue de bois.
Prenons un exemple extérieur à vos activités. Beaucoup reprochent à un musée bien connu que le « simple » visiteur ne peut pas y dessiner ou prendre des notes (même avec des crayons). Cette institution pourrait expliquer que si elle ne prend pas cette mesure, le prix du ticket augmenterait car son espace où il expose est relativement étroit et que ces deux activités ralentiraient le flot des visiteurs, d’où le risque de ne plus vendre assez de places pour équilibrer son budget.
Et prenons un exemple concernant l’Hôtel Solvay. Vos conditions générales sont tellement longues qu’il ne doit pas être compliqué d’y ajouter un wagon. Par exemple, votre public serait certainement très intéressé que vous lui expliquiez sans langue de bois pourquoi il ne peut pas immortaliser par des photos sans flash sa visite de cette extraordinaire demeure. Par exemple, parce qu’il s’agit de vendre à la sortie si possible davantage de catalogues ou de cartes postales (c’est l’argument qu’utilisait un syndicat de gardiens pour dénoncer l’interdiction de photographier au Musée Orsay)? Ou pour d’autres raisons… ».

3 : Supprimer une phrase léonine?

- Questionnement de « La Ligue des Usagers Culturels » (L.U.C.):
« Pourriez-vous supprimer dans votre texte la phrase suivante qui est léonine: « Ce billet ne sera ni remboursé, ni échangé ».
Je vous signale que, suite à une plainte analogue concernant le Botanique à Bruxelles, le 17 mars 2009, sa directrice générale Annie Valenti, a répondu positivement ».

- Réponse du service billetterie de Visit.Brussels :
« Si Annie Valenti a pu se permettre de vous répondre positivement, c’est parce qu’elle détient la décision finale de rembourser ou d’échanger le ticket. Etant une centrale de réservation de plusieurs acteurs culturels, nous ne détenons pas cette décision.
Cependant, il nous arrive de solliciter l’accord de nos partenaires pour rembourser ou, ce qui est plus fréquemment le cas vu la crise sanitaire, pour échanger les tickets ».

- Commentaire de la L.U.C. :
« S’il vous arrive de solliciter l’accord de vos partenaires pour rembourser, comme vous nous l’écrivez, c’est que ce n’est pas chose impossible. C’est la preuve même que votre phrase « Ce billet ne sera ni remboursé, ni échangé » est, dans certains cas, contraire à la réalité. Par cet fait même, sa mention, dans votre texte des conditions générales, est donc trompeuse à l’égard de l’ensemble du public.
Pourriez-vous en avertir les acteurs culturels avec lesquels vous traitez afin qu’ils vous donnent leur accord pour y mettre fin?
Ils y ont intérêt puisque, de toute façon, cette phrase est inapplicable et son objectif qui consiste à intimider l’usager peut ternir leur image.
Nous espérons que vous nous informerez des résultats de cette démarche que nous vous conseillons de mener ».

Mais… la façade de l’Hôtel Solvay mérite votre selfie … et ceci vous est permis!

Annexe:

À titre informatif, afin de permettre au lecteur de mieux se positionner par rapport à notre point 2 intitulé «Être plus constructif à l’égard du public », voici le texte des conditions générales utilisé par Visit.Brussels :

« Le présent document électronique, imprimé sur papier blanc, constitue le seul et unique Billet d'entrée à l'Évènement/visite guidée.
L'impression doit être parfaite, tous les éléments doivent être lisibles sans aucune confusion.
Dans le cas contraire, l'accès à l'Évènement/visite guidée sera refusé.
Le contrôle du Billet sera effectué à l'aide de lecteurs de code barre par l'Organisateur de l'Évènement/visite guidée, sous sa responsabilité, lors de l'entrée audit Événement/visite guidée.
L'Organisateur se réserve le droit de contrôler l'identité du client à l'entrée de l'Évènement/visite guidée.
Le client devra donc obligatoirement être muni d'une pièce d'identité officielle en cours de validité.
Chaque code-barres représente un seul Billet d’entrée.
Le Billet ne peut être scanné qu'une seule fois à la date indiquée sur ce dernier.
Si le même code-barres est présenté plusieurs fois, seul le premier Billet
scanné au contrôle donnera accès à l'Évènement/visite guidée.
Ainsi, seule la première personne présentant le Billet sera admise à accéder au lieu où se déroulera l'Évènement/visite guidée.
Cette personne est présumée être le porteur légitime du billet.
Toute tentative d'abus, de contrefaçon ou de fraude, sera susceptible de poursuite judiciaire.
Si la date inscrite sur le Billet ne correspond pas à la date du jour, l'accès sera refusé.
Ce Billet ne sera ni remboursé, ni échangé.
L’Organisateur peut refuser l'accès au lieu où se déroule l'Évènement/visite guidée s'il se rend compte que plusieurs impressions ou reproductions d'un Billet imprimable sont en circulation et qu'un accès au lieu de l'Évènement/visite guidée a déjà été accordé au porteur d'une impression ou d'une reproduction.
Si la personne détentrice d'un billet imprimable à domicile se voit refuser l'accès au lieu où se déroule l'Évènement/visite guidée, elle n'aura droit à aucun remboursement du prix payé.
Le Client assiste à l'Évènement/visite guidée sous sa propre responsabilité et
renonce à tout recours à l'encontre de VISITBRUSSELS.
VISITBRUSSELS n'est pas responsable en cas de retard ou changement d'horaire de l'Évènement/visite guidée. ».