jeudi 10 février 2022

Payer avant ou après, et combien on veut !

En Europe, une autre façon de payer (ou pas) dans un musée débute le 27 janvier 2022 à Genève.
Le Musée d’art et d’histoire de Genève (MAH) met fin à ses tarifs d’entrée au profit d’un prix libre: «Paie ce qu’il te plaît!».
Dorénavant, c’est au public de déterminer le montant qu’il souhaite verser. Chaque visiteur a le choix entre payer ce qu’il souhaite au début ou à la fin de sa visite. Il recevra un billet indiquant le montant versé.
Cette approche relativement nouvelle en Europe continentale est assez répandue dans certains musées anglo-saxons.
Bien sûr, les sceptiques poseront diverses sous-questions. Le musée sait y répondre de façon fort intéressante : http://institutions.ville-geneve.ch/fileadmin/user_upload/mah/2015/Preparer_sa_visite/Questions_Site_DEF.pdf

À Genève, le Musée d’Art et d’Histoire

Qu’en pense notre Ligue des Usagers culturels?

En fait, c’est le retour de ce que nous nommons la « tirelire ». Nous la conseillons d’ailleurs depuis fort longtemps aux musées belges qui se plaignent de perdre de l’argent en pratiquant la «gratuité du premier dimanche du mois» (mais… ils n’en tiennent le plus souvent pas compte… et continuent donc de se plaindre de leur manque de financements).

Une étude faite à Gand montre que le public met plus d’argent dans la tirelire si elle est à la sortie plutôt qu’à l’entrée. C’est instructif. Bien sûr, si l’accueil est exécrable, cela ne sera pas le cas. Et donc, le visiteur est deux fois gagnant : il fait ce qu’il souhaite avant de sortir … et cette façon de faire va pousser les musées à bien l’accueillir.

La tirelire à la sortie est aussi un moyen concret (gratuit à mettre en place) pour mieux estimer pour les musées s’ils respectent bien leurs visiteurs. Que du positif donc, et c’est aussi une façon d’un peu mieux lutter contre la bureaucratie qui plane parfois dans certaines institutions.

L’étude gantoise indique un élément capital en plus. Le public n'est pas pingre en général. Certains paient même beaucoup. Bien souvent donc, cette façon de faire rapporte autant, si pas plus, que le total des rentrées dans les caisses avec les tarifications obligatoires habituelles.

Enfin, il y a en plus deux intérêts «citoyens». D'abord, tous les moins nantis ont ici accès à la culture. Et puis, fondamentalement, le visiteur n'est plus un client, mais devient un ami du musée qu’il soutient comme il le veut, un donateur.

Voilà un beau projet pour nos musées fédéraux?

Et si cette évolution du MAH de Genève donnait des idées à nos musées bruxellois?
N’oublions par que le13 décembre 2021, Thomas Dermine, le Secrétaire d’État chargé notamment des musées fédéraux, nous a répondu : « Quant à la gratuité le premier mercredi du mois, je soutiens les musées qui la pratiquent mais n’entends pas l’imposer aux autres. En effet, il me semble nécessaire de laisser une autonomie sur ce point aux Directions. Les tarifs sont les seules marges de manœuvre dont elles disposent budgétairement dès lors que le niveau des dotations leur est imposé. Je suis, cela dit, plutôt favorable à des tarifs différenciés permettant à chacun d’aller au musée qu’à des mesures générales de gratuité qui profitent également aux visiteurs les plus aisés et qui augmentent le besoin de fonds publics nécessaires pour assurer le fonctionnement des Institutions. Je suis toutefois évidemment intéressé par votre projet de texte et le lirai avec beaucoup d’intérêt. C’est un débat difficile mais je partage évidemment l’idée que le prix est un des leviers permettant d’élargir le public des musées ».

Beaucoup de nos musées ont suspendu ou abandonné cette gratuité d’une demi-journées (de 13H à 17H) du « premier mercredi ». Alors pourquoi pas la remplacer par un « tirelire », chaque premier dimanche du mois?
Nous avons lancé cette proposition auprès de Thomas Dermine qui nous a répondu le 1er février 2022 : « Je vous remercie pour votre message ainsi que pour ce partage. Je ne manquerai pas d’en discuter avec mon équipe ».